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Comment aligner le mobile money aux standards des services bancaires classiques en zone CEMAC ?

posté par Le Hub de la Finance Digitale , le 05 fév 2024
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Le mobile money s’est imposé dans les six états d’Afrique centrale (Cameroun, Centrafrique, Congo, Gabon, Guinée Equatoriale, Tchad) comme le moyen par excellence pour la population de déplacer des fonds de manière pratique et peu coûteuse. D’après le dernier rapport sur les services financiers numériques en zone CEMAC, publié en 2022 par la Banque des Etats de l’Afrique Centrale (BEAC), le marché du mobile money a bientôt atteint sa maturité avec un taux de bancarisation brut (nombre de comptes rapporté à la population totale) s’élevant à 145%.

Contrairement aux titulaires de comptes dans le système bancaire classique, les usagers des services de mobile money n’ont pas accès à des services tels que le crédit et l’assurance (même si l’on observe de timides initiatives des prestataires camerounais dans le domaine du micro-crédit, corsetées par la directive en la matière). Par ailleurs, les sommes détenues dans ces comptes, qui représentent pourtant une réserve de valeur, ne génèrent pas d’intérêts créditeurs et ne peuvent pas être mobilisées directement par les fournisseurs de service de mobile money pour l’investissement dans l’économie.

Force est de constater que le compte de mobile money, qui pourrait constituer un canal d’accès aux services bancaires formels en sus du paiement, reste confiné à un moyen de déplacement des fonds entre émetteur et bénéficiaire.

Les freins à l’accès au crédit en zone CEMAC

La CEMAC est une communauté économique qui souffre d’un accès restreint au crédit. En effet, conformément à la convention de coopération monétaire entre les Etats membres de la BEAC et la République française, en ses articles 10, 11 et 12, la Banque Centrale doit à la fois maintenir la parité fixe entre le franc CFA et l’euro (qui est de 1 euro pour 655,957 francs CFA et auparavant de 1 franc français pour 50 francs CFA) et assurer la libre transférabilité des fonds entre les deux zones monétaires. Ces contraintes l’obligent à mener une politique monétaire restrictive avec un taux d’intérêt directeur élevé (5%) qui se répercute sur les taux d’intérêt pratiqués par les banques et donc le coût du crédit. De plus, la faiblesse des infrastructures spécialisées dans l’évaluation des risques-clients (bureaux de crédit) et la quasi-absence de communication entre celles-ci aggravent l’asymétrie d’information dans l’accès au crédit des titulaires de comptes bancaires, sans parler des détenteurs de compte de mobile money pour lesquels n'existe aucune institution spécialisée dans l’évaluation du risque-client.

Bien que la solution au problème d’inadéquation monétaire relève au bout du compte de la décision politique, celui d’asymétrie d’information laisse le champ libre au régulateur pour adopter des mesures opportunes pour dynamiser l’intermédiation financière. Ainsi, la stratégie adoptée par la CEMAC pour faciliter l’accès des détenteurs de compte de mobile money aux services bancaires classiques fut l’alignement des normes et processus selon le principe d’intégrité financière, qui est au cœur du cadre réglementaire de l’activité de banque commerciale classique. Cette approche se matérialisa par le déploiement d’un système nommé Centrale des Incidents de Paiement, comportant trois modules dont le plus important est le Fichier Régional des Clients et Comptes Bancaires (FRCB). Ce dernier est basé sur le Know Your Customer (KYC) électronique et catalyse l’évaluation des risques-clients. Cette innovation a été introduite par un règlement communautaire (en sa Partie III) adopté en 2016, qui s’applique à tous les établissements assujettis à la BEAC (banques, prestataires de services de mobile money et établissements de microfinance).

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